Jeudi 20 novembre 2025 · 20h30



Édito

 

 

 

DOUBLE VISION : KILLING TIME

Ce rendez-vous de Double Vision organise la rencontre de deux grandes cinéastes, Fronza Woods et Chantal Akerman, autour du racisme endémique et des relations entre Noirs et Blancs aux États-Unis sur fond de banalisation des idéologies suprémacistes blanches. À l’horreur nue de Sud, aux longs travellings et à la rigueur contemplative de Chantal Akerman répondent d’une façon presque heurtée la vivacité et la force irréductible et décapante des deux seuls courts métrages qu’a réalisé Fronza Woods. La cinéaste propose un cinéma terre à terre, audacieux et ironique, très ancré dans les corps et l’intimité comme dans l’infime. Deux gestes comme deux portraits, d’une infinie tendresse portée par un regard acéré qui renverse l’ordre visuel dominant. Peut-être opposent-ils une forme de résistance absente du film de Chantal Akerman ? Il fallait donc ce cinéma pour converser avec le paysage spectral, mental et physique, qu’engage Sud comme cartographie d’une mémoire de l’abjection dans la relation entre terre, territoire et violence.

Claire Lasolle

Killing time

de Fronza Woods | 1979 | États-Unis | 10 min

Killing Time, ballade amère et insolente, montre le désarroi nonchalant d’une femme, seule dans sa chambre, cherchant une tenue convenable pour se suicider. Sous un ton joueur plutôt qu’enjoué (le sifflotement faussement gai), le film finit par hypnotiser, l’humour agissant moins comme garde-fou que comme corollaire du désespoir.


Fannie’s film

de Fronza Woods | 1981 | États-Unis | 16 min

En parallèle à des figures hiératiques qui vont et viennent sur des machines de sport, Fannie est filmée seule en train de nettoyer la salle vidée de ses fantômes. Le film renverse les paradigmes, plongeant le visible dans un espace nu et donnant corps à une voix inaudible – une voix d’autant plus bouleversante qu’elle dit sa joie de l’existence qu’elle a vécue.


Sud

de Chantal Akerman | 1999 l Finlande, Belgique, France | 1h10

Partant du lynchage d’un Noir par trois Blancs, “Sud” dépeint un Texas nostalgique de son passé esclavagiste. Dans une alternance de plans fixes et de longs travellings, Chantal Akerman va reconstituer l’horrible fait divers qui eut lieu en juin 1998 à Jasper. Un Noir a été enchaîné à un camion et traîné pendant plusieurs kilomètres sur une route, par trois Blancs. La victime était un musicien. Les criminels appartenaient à des groupes d’extrême droite.


À propos de Fronza Woods

Née à Détroit en 1943, actrice, réalisatrice, scénariste, assistante son, professeure de cinéma, lectrice de scénario, prof de danse, Fronza Woods a immigré en France en 1987, dans le sud-ouest où elle vit de la manière la plus créative possible. Elle fait partie de la génération de réalisatrices noires qui a émergé dans les années 70 et 80, après le mouvement des droits civiques et le mouvement Black Power.

« I like films about real people. I am inspired by almost everything but especially by struggle. I am interested in people who take on a challenge, no matter how great or small, and come to terms with it. What inspires me are people don’t sit on life’s rump but have the courage, energy, and audacity not only to grab it by the horns, but to steer it as well. » Fronza Woods

 

À propos de Chantal Akerman

Chantal Akerman est une cinéaste belge, née en 1950 à Bruxelles et décédée en 2015 à Paris. Elle entre à l’INSAS en 1967 qu’elle quitte aussitôt, rejetant le cadre rigide de l’école et réalise l’année suivante son premier court métrage, Saute ma ville, première expression d’un cinéma libre et radical. Artiste infatigable, Akerman trace sa route librement en explosant les frontières narratives et géographiques pour vagabonder entre les genres, avec comme constante la mélancolie, le trauma personnel ou l’angoisse du monde contemporain.

« Sud ? Pourquoi le Sud ?
J’avais une sorte d’attirance. Toute littéraire sans doute.
Faulkner, mais aussi Baldwin.
Et quand j’ai décidé de partir là-bas, rien n’était encore arrivé, tout semblait calme et puis juste avant mon départ, il y a eu un nouvel incident raciste, c’est comme ça qu’on dit, enfin un lynchage à Jasper, Texas. À notre époque et plus que jamais, il y a de la purification dans l’air. Alors il m’a fallu aller là-bas aussi. »  Chantal Akerman


DOUBLE VISION

Est un appel et une réponse,
Le cinéma et son écho,
Un phénomène dans lequel l’enregistrement du monde est projeté en retour sur lui-même,

C’est une nouvelle série de projections mensuelles. DOUBLE VISION est proposée dans le cadre d’une double programmation mensuelle qui associe des œuvres cinématographiques radicales, transformatrices et visionnaires à leur propre miroir. Avec des essais critiques, des programmes de films et de vidéos sélectionnés, des cinéastes internationaux invités et des films tirés de l’histoire riche et complexe de l’anthropologie visuelle et du cinéma expérimental, DOUBLE VISION cherche à tracer une ligne d’influence émotionnelle, politique, viscérale et critique entre ce qui est ressenti, ce qui est vu, ce qui est connu et ce qui peut être compris. DOUBLE VISION est présenté avec le soutien du ANFAA A*Midex Research Group (AMU/IDEAS) et en partenariat avec La Fabrique des écritures ethnographiques (FÉE).

 

*DOUBLE VISION
is a call-and-response
is cinema and its echo
is a phenomenon in which the recording of the world is projected back on itself
is a new monthly screening series

*DOUBLE VISION
is offered in a monthly program that takes radical, transformative and visionary works of cinema and pairs them with their mirror selves. Featuring critical essays, curated film / video programs, visiting international filmmakers and focusing on films drawn from the rich and complicated histor/ies of visual anthropology and experimental cinema, DOUBLE VISION looks to draw an emotional, political, visceral and critical line of influence between what is felt, what is seen, what is known and what can be understood.

*DOUBLE VISION
is presented with the support of ANFAA A*Midex Research Group (AMU/IDEAS)in partnership with La Fabrique des écritures ethnographique (FÉE)


Informations pratiques

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La billetterie ouvre 30 minutes avant le début de chaque séance.

Nous pratiquons le prix libre (chaque personne paie ce qu’elle veut/peut/estime juste).

Nous croyons au prix libre comme possibilité pour chacun.e de vivre les expériences qui l’intéressent et de valoriser le travail accompli comme il lui paraît bienvenu. L’adhésion à l’association est nécessaire pour assister aux projections, elle est accessible à partir de 8€ et valable sur une année civile.

Il est aussi possible de prendre son adhésion en ligne ! Pour celleux qui le souhaitent et le peuvent, cette adhésion permet aussi de nous soutenir, en ajoutant un montant de son choix.

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