Édito
Voilà que vient la 18e édition des Rencontres Films Femmes Méditerranée. Une année de plus où nos regards ont scruté les bords de mer, à la rencontre d’œuvres cinématographiques et de trajectoires humaines. Des intériorités singulières engagées, deviennent collectives, se révélant à la lumière tremblante des salles obscures. La programmation met en résonance la violence dans l’espace domestique et dans le monde professionnel mais aussi les gestes quotidiens et les gestes d’amour, comme dans le bouleversant Blackbird, Blackbird, Blackberry d’Elene Naveriani (Georgie), cinéaste qui nous fera l’honneur d’une leçon de cinéma.
Cette année, nous mettons à l’honneur l’œuvre cinématographique de l’artiste Sarah Maldoror, avec comme film d’ouverture Sambizanga, en copie restaurée : une œuvre poétique qui rend hommage aux combattant·es de l’ombre pour la libération des peuples et contre le pouvoir colonial. Pour la première fois à Marseille, nous pourrons ensemble découvrir son travail lors du temps Sarah Maldoror, une cinéaste. Annouchka de Andrade, l’une de ses filles, accompagnera les projections. Enfin nous clôturons avec Madame de Sévigné d’Isabelle Brocard (France), portrait à l’écriture fine et intime d’une grande figure de la littérature française du XVIIème siècle.
C’est avec un infaillible plaisir renouvelé que nous vous invitons cette année à participer à ces Rencontres, afin de nous retrouver autour de récits multiples, toujours en mouvement, pour célébrer les femmes et la Méditerranée !
Toto Bissainthe
de Sarah Maldoror | 1984 | France, Haïti | 4 min
Sarah Maldoror filme dans ce court-métrage la chanteuse haïtienne Toto Bissainthe lors de l’une de ses prestations. Ce fut avec Toto Bissainthe que Sarah Madoror fonda en 1956 la Compagnie africaine d’art dramatique Les Griots.
Un dessert pour Constance
de Sarah Maldoror | 1981 | France | 52 min
Paris des années 70. Bokolo et Mamadou, balayeurs de la ville de Paris, cherchent un moyen pour payer le retour au pays d’un de leur camarade malade. Ils découvrent un jour dans les poubelles un vieux livre de recettes de cuisine. Leur vient alors l’idée de participer à un jeu télévisé qui consiste à décliner avec précision les ingrédients des meilleurs plats de la cuisine française. Ils apprennent par cœur les recettes des sauces, entremets et desserts…
Sarah Maldoror
Sarah Maldoror est une cinéaste française, née en 1929 et décédée en 2020. Née d’un père guadeloupéen et d’une mère gersoise, elle choisit le nom d’artiste « Maldoror » en hommage au poète surréaliste Lautréamont.
Sarah Maldoror est la principale fondatrice à Paris en 1956 (avec Samba Ababacar, Toto Bissainthe, Timiti Bassori etc.) de la première compagnie théâtrale noire « Les Griots« . Elle saisit dès la fin des années 1950 l’enjeu de l’audiovisuel pour les luttes de libération et choisit de partir à Moscou en 1961 pour se former au cinéma.
À son retour, Sarah Maldoror s’installe en Algérie où elle réalise deux ans plus tard son premier film. Cinéaste noire militante de stature internationale, compagne de Mario de Andrade, l’un des leaders du Mouvement Populaire de Libération de l’Angola, Sarah Maldoror est engagée dans la lutte de libération.
À la fin des années 1960 et au début des années 1970, alors que les guerres d’indépendance font rage dans les colonies portugaises et sont en Occident largement occultées, Sarah Maldoror est seule à parvenir à porter au cinéma la voix des militants africains en lutte. Une voix qui dit : l’ignorance et le mépris de la culture des colonisés, la torture et l’emprisonnement des opposants à la colonisation, l’engagement des femmes, la solidarité humaine face à l’oppression.
Monangambé (1969, basé sur le roman d’un écrivain angolais alors emprisonné par le pouvoir colonial portugais – premier film de Sarah et qui se voit déjà décerner plusieurs prix dont celui de meilleur réalisateur par le Festival de Carthage), Des fusils pour Banta (1970, tourné en Guinée Bissau alors que Sarah Maldoror est elle-même engagée dans le maquis) et Sambizanga (1972, tourné au Congo sur la guerre de libération de l’Angola, Tanit d’or du Festival de Carthage, Prix de l’Office catholique de Ouagadougou) assoiront sa réputation de professionnalisme et feront d’elle une référence du mouvement militant international.
Ses films se caractérisent par une grande subtilité dans le traitement des sujets, par une qualité esthétique et un souffle poétique constants. Parmi la trentaine de documentaires et films qu’elle a réalisés, nous retenons sept thèmes majeurs de son œuvre qu’elle sait éclairer d’un regard « vu de l’intérieur », où les femmes comme les hommes peuvent se retrouver :
- les guerres africaines contemporaines de libération et la persévérance dans la lutte,
- les femmes dans la lutte,
- le racisme insidieux et quotidien,
- la solidarité entre opprimés,
- la répression politique en « temps de paix » (pour ceux qui refusent de se soumettre enfermements, internements psychiatriques…),
- la lutte via la culture, avec des portraits de Toto Bissainthe, Aimé Césaire ou Léon-Gontran Damas,
- la réhabilitation de l’histoire noire et de ses héros, histoire sciemment occultée et distordue par le pouvoir colonial, et qu’il appartient aux colonisés de se réapproprier;
Sarah Maldoror a au cours de sa carrière été sollicitée et primée par de très nombreux festivals d’Europe, des Amériques et d’Afrique, et été invitée à plusieurs reprises par des universités américaines pour y présenter ces films.
Source : La Quinzaine des réalisateurs
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