20h30

Un Flic

de Jean-Pierre Melville, 1972, France, 1h40

En hiver, dans une station balnéaire, une banque est dévalisée par une bande dont le cerveau est Simon, un ami du commissaire Coleman. L’argent doit servir à monnayer un important chargement de drogue. Le commissaire est informé de ce « coup » par un indicateur …

Entretien de Jean-Pierre Melville sur le plateau de l’émission de Paul Giannoli en 1972 :

Paul Giannoli
Donc Jean-Pierre Melville rapidement sur l’actualité, elle est évidente sur tous les murs de Paris votre dernier film Un flic vedette Alain Delon, Catherine Deneuve. Alors une question d’abord c’est la première fois qu’il y a dans un de vos films un mot d’argot, et cette fois-ci le mot d’argot est même spectaculaire puisque c’est le titre, Un flic, alors qu’habituellement on ne dit pas flic chez vous ?

Jean-Pierre Melville
Non pas du tout, d’ailleurs on ne l’emploie pas une seule fois dans le film. Je suis désolé de vous démentir Paul, c’est là seconde fois que j’emploie un mot d’argot puisque Le Doulos c’était aussi un mot d’argot, c’était aussi le titre mais on n’employez plus jamais dans Le Doulos un seul mot d’argot. Vous me demandiez pourquoi j’avais pris ce titre un peu argotique, c’est parce que les policiers eux-même entre eux s’appellent des flics. Et je l’ai remarqué à plusieurs reprises, ils n’ont pas peur d’employer ce mot-là, c’est un mot tellement courant maintenant et devenu tellement commun, pour les Français, que ça a presque cessé d’être un mot d’argot.

Paul Giannoli
Mais ce que je voudrais que vous m’expliquiez, c’est votre répugnance à employer des mots d’argot alors que vos films sont principalement peuplés de gens en marge, de truands, de gangsters, selon le vocabulaire, et de flic.

Jean-Pierre Melville
Oui, parce que j’ai horreur, dans le cinéma policier que je tente de faire, de faire du réalisme, j’essaye toujours de m’éloigner le plus possible d’un aspect véridique, réelle des choses, je ne le savais pas quand j’ai commencé à faire des films policiers mais Hitchcock a dit un jour une phrase extraordinaire : « quand je vois au détour d’une séquence, ce profilait le hideux visage de la vérité je lui tords le cou ». Et je crois que c’est un des moyens de donner le sentiment aux gens qu’ils sont au cinéma, nul part ailleurs, qu’on n’a pas la prétention de leur montrer des documents ou des actualités et de les faire rêver, je crois que c’est essentiel, il faut que le cinéma soit quand même aussi en dehors du fait qu’il est un art un divertissement de spectacle.

Paul Giannoli
Le cou à la vérité vous le tordez volontiers et dans ce film une nouvelle fois surtout quand vous mettez en scène une police, non pas une police de rêve mais une police rêvée, je veux dire par là que les inspecteurs, les commissaires que vous mettez en scène sont toujours beaucoup mieux que l’image qu’on se fait d’un commissaire ou d’un inspecteur, Bourville dans Le cercle rouge, Alain Delon dans Un flic, Paul Meurisse même dans Le deuxième souffle, y sont soit cultivés, soit élégants, soit astucieux, soit amusants, ce qui est paraît-il, n’est pas le cas ?

Jean-Pierre Melville
Ah si, je ne suis pas du tout d’accord avec vous, je crois que tous mes policiers François Périer, Jean Desailly aussi ont en commun cette attitude polie et respectueuse, qu’ils n’ont pas obligatoirement tout le temps et qu’ils n’ont pas toujours, vous avez bien vu qu’à un certain moment dans mon film mon policier à même la main leste. Il cesse d’être à ce moment-là le parfait gentleman dont vous parlez. Je ne dis pas non plus que mon policier, le policier commun à tous mes films, soit le policier que l’on rencontre tous les jours mais j’ai le sentiment qu’il existe et qu’on le rencontre assez souvent. J’ai eu à cet égard une conversation avec plusieurs commissaires de police avant-hier soir qui ont été peut-être un peu réticent au début en disant oui mais c’est quand même un policier de cinéma, nous ne sommes pas tout à fait comme ça, nous passons notre vie à taper en quatre exemplaires avec trois carbones les choses que les gens nous disent ou que nous leur faisons dire et ça bien sûr, nous nous rendons compte que ce n’est pas cinématographique, que le cinéma policier doit être autre chose.

Paul Giannoli
Mais votre anticonformisme Jean-Pierre Melville c’est un peu d’anoblir la police ?

Jean-Pierre Melville
D’anoblir les gangsters aussi, les gangsters que j’ai connu, comme tous les hommes de ma génération, j’ai vécu et j’ai connu toute sorte de monde, les gangsters que j’ai connu n’étaient pas du tout des gangsters qui ressemblaient en quoi que ce soit à ceux que je montre, ils étaient la plupart du temps très bêtes, très vulgaires, pas du tout habillés de la même façon que les miens, la cravate de tricot noire chez les gangsters je ne l’a connaît pas, je ne l’ai pas encore vu, il y a encore la cravate de satin avec une perle chez les gangsters.


En savoir plus

Voir Jean Pierre Melville à propos de son film « Un flic »


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Ronde de nuit : Le cinéma policier français nocturne

Du mardi 19 février
au samedi 23 février 2019

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