Cette programmation est constituée des films réalisés après son arrivée en France. En 1996, Robert Kramer écrit dans un de ses carnets : « Une ligne incandescente qui traverse le temps ». Ces mots évoquent le titre du film qu’il travaillait à ce moment-là : A Line Through Time , qui deviendra Le Manteau (1996). Cette ligne incandescente désigne une quête que le cinéaste poursuivra jusqu’à son dernier film. Une quête qui a rapport à l’enfance, à l’Histoire et aux luttes, toujours présentes.
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Guns

de Robert Kramer, 1980, 1h35

Un journaliste enquête sur un mystérieux trafic d’armes entre Paris et Marseille et navigue entre deux femmes : Margot, son ancienne maîtresse venue à Marseille accompagner sa mère malade, et Lil, l’Américaine avec qui il vit à Paris.

Figuration des villes dans Guns (1980) de Robert Kramer

Guns est le premier film que Robert Kramer tourne en France. L’action se déroule entre Paris et Marseille. La structure chorale de la narration permet le passage d’un personnage à un autre, d’un lieu à un autre sans transition, au fil des séquences. Pourtant les différents espaces ne sont pas filmés de la même manière. Kramer donne par ses cadrages, une identité aux lieux, comme aux personnages. Paris est filmée en plongée depuis les fenêtres des appartements, la place de Beaubourg depuis le quartier de
l’Horloge, la gare Montparnasse depuis les immeubles qui longent les rails. La foule est présente, constante, la ville grouille. Les rencontres dans les cafés, au hasard des rues sont possibles. Marseille est filmée à sa périphérie, jamais en son cœur. Elle est figurée par un labyrinthe de containers à l’Estaque. Ceux qui la peuplent sont les ouvriers du port. Une villa entourée de mur abrite un politicien véreux. Robert Kramer associait la métropole marseillaise à l’espace d’une ville américaine. Dans cette circulation du nord au sud, Robert Kramer est en situation d’Estrangement aucun espace ne lui est familier. En créant, des insertions, des ruptures, des interstices, il fracture le réel en de multiples lieux et récits.
Il s’agit pour nous de montrer comment les corps des personnages circulent dans des espaces fragmentés, comment chacun cherche une place où vivre ou mourir. Nous explorerons des espaces qui se croisent, des personnages qui s’aident et s’aiment, mais se diluent aussi dans leur quête. Pour tenter de faire voir comment un réseau d’expérience se construit dans le labyrinthe des villes, des espaces parcourus, comme une étoffe qui se tisse.