Dimanche 4 mai 2025 · 20h30


Édito

 

 

En 1955, la France est en quelques mois percutée de plein fouet par le cinéma furieux, ambigu et sans concession de Robert Aldrich. L’assaut est si puissant que François Truffaut dira : “l’année 55 est l’année Aldrich”. Bronco Apache, Vera Cruz et Kiss Me Deadly sont de vrais chocs cinéphiliques et vont avoir un énorme impact sur la nouvelle vague car soudain le cinéma hollywoodien apparaît plus libre, plus brutal, plus fou.

Avec quelques autres, dont Samuel Fuller, Robert Aldrich qui met en scène ses idées sur la nature humaine, entre brutalité contextuelle et cruauté inhérente, va incarner une formidable promesse de renouvellement du cinéma américain de l’après-guerre. Le succès de Kiss Me Deadly, ce classique sans équivalent du film noir, lui permettra de devenir producteur sous la curieuse dénomination inversée de Associates & Aldrich. Loin de se cantonner au film de genre, Aldrich va réaliser de magnifiques et excessifs portraits de femmes interprétés notamment par Bette Davis et Joan Crawford (What Ever Happened to Baby Jane?), Kim Novak (The Legend of Lylah Clare) ou Beryl Reid (The Killing of Sister George), fabuleuses icônes dont Fassbinder se souviendra. On retrouve son traitement du visage des acteurs comme un masque outrancier et beaucoup d’autres tendances “Aldrichiennes”, comme l’attention portée au son, chez David Lynch qui cite abondamment Kiss Me Deadly dans Lost Highway. Cité par Jean Luc Godard dans Histoire (s) du Cinéma, les frères Coen et Quentin Tarantino lui doivent aussi beaucoup. On retrouve une telle outrance et une telle énergie dans les comédies italiennes des années 70 comme Affreux, Sales et Méchants ​​d’Ettore Scola,1976 ou l’Argent de la Vieille de Luigi Comencini,1977 dans lequel Bette Davis interprète la vieille du titre.

Effets de dissonance (plastique, sonore) qui interviennent sporadiquement, grotesque qui menace toujours de pervertir les émotions violentes, agressivité théâtrale parfois jusqu’au limites de l’écœurement amplifiant les névroses de ses personnages, Aldrich filme des monstres dans des situations extrêmes, qu’il désamorce en éclairs de violente lucidité par un humour trivial. L’identité sexuelle est au centre d’une œuvre qui passe en revue différentes formes d’hystérie masculine transformées en manifestations d’hyper virilité et une féminité parfois étonnement agressive. L’affrontement entre les sexes peut prendre la forme de contradictions parfois brutales lorsqu’il filme les histoires d’amour, comme celle d’une adolescente héritière de bonne famille avec un truand attardé mental et curieusement pur dans The Grissom Gang.

Lui-même vilain petit canard d’une famille d’industriels de l’aristocratie américaine désespérant de cette progéniture, et dont il expose les horribles tendances dans The Grissom Gang, neveu de John Rockefeller, Robert Aldrich est un cancre patenté qui ne s’intéresse qu’au football (américain, bien sûr). Un oncle le pistonne pour qu’il “rentre” à Hollywood où il va beaucoup grossir, démesurément même, il sera assistant de Jean Renoir, Joseph Losey, Chaplin. Puis, refusé par l’armée américaine, il va profiter de cette période où beaucoup de ses confrères sont sous les drapeaux pour grimper rapidement les échelons le menant à la réalisation.

Proche du parti communiste, il n’y adhère pas pour une question de timing : “Je crois que si j’étais arrivé en californie en 1936 et non en 1941, je serai entré au parti. Être communiste à l’époque n’avait rien à voir avec le désir d’ériger des barricades. C’était une disposition d’esprit, une attitude face à la politique, à l’industrie cinématographique, au gouvernement et à l’administration Roosevelt. Cela n’avait rien de clandestin et je pense que toute personne un peu sensée était destinée à cette époque à devenir communiste. Il n’y a aucun doute la dessus. Lorsque je suis arrivé en 1941, ceux qui se reconnaissaient dans cette idéologie étaient de toute évidence les plus intelligents, les plus rapides, les meilleurs, ceux avec lesquels il était le plus stimulant de travailler.”

Olivier Puech

Pas d’orchidées pour Miss Blandish

de Robert Aldrich | 1971 | États-Unis | 2h08 | Vostfr

Au début des années 30, Barbara Blandish, la fille d’un milliardaire vivant à Kansas City, est kidnappée par trois vauriens. Ceux-ci se font rapidement doubler par le gang Grissom, un peu plus expérimenté, dirigé par Ma Grissom (Irene Dailey, actrice Brechtienne, remarquable dans le rôle), la chef du gang, une vieille et redoutable mégère.
Slim Grissom, fils de Ma, attardé mental  et membre du gang, tombe aussitôt amoureux d’elle, tandis qu’une demande de rançon est envoyée à John P. Blandish.

Basé sur le célèbre roman de James Hadley Chase, No Orchids for Miss Blandish est un mélange de sexe, de violence et d’immoralité et raconte l’histoire brutale de la jeune Miss Blandish, une héritière kidnappée qui tombe amoureuse de l’un de ses ravisseurs fous.
Un fascinant exemple de film noir, que le Monthly Film Bulletin a décrit comme « l’exposition la plus écoeurante de brutalité, de perversion, de sexe et de sadisme jamais montrée sur un écran de cinéma ».


Olivier Puech

Libraire de profession de 1982 à 1991 et titulaire d’un master en Arts du Spectacle à l’Université d’Aix Marseille, il travaille depuis 2003 comme comédien avec les metteurs en scène : Sarah Sonthonnax, Nanouk Broche, Micheline Welter, Leopold Von Verchuren, Anne Claude Goustiaux, Danielle Bré, Christophe Chave, Justine Simon, Thierry de Peretti, Laurent de Richemond et Franck Dimech, dont il est membre du conseil d’administration de la compagnie, le Théâtre de Ajmer. Il a suivi pendant des années et jusqu’à son décès, l’enseignement d’Alphéa Pouget, danseuse et chorégraphe Lapone.
Membre fondateur du journal Taktik en 1988, Il a également, depuis 2015, une activité de chroniqueur théâtral au journal Ventilo et de programmateur au cinéma Videodrome 2.

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Death and Night and Blood #2

 

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