A l’heure où le tourisme reprend à Marseille, haut lieu du graffiti, certains se payent des visites guidées sur le thème du Street Art, et les pionniers New Yorkais sont exposés dans un prestigieux château provençal. Pourtant, la mairie repeint régulièrement des kilomètres carrés de murs graffés, effaçant la trace de celles et ceux qui existent, et laissent un signe qui les distingue, car c’est ainsi qu’Agnès Varda les désigne dans Mur Murs. Pour être honnête, elle parle des peintres qui produisent d’immenses fresques figuratives, dans les quartiers pauvres de Los Angeles en 1980. Les choses ont changé depuis et le graffiti s’est développé, exporté, importé, transformé, gravé, collé, dessiné, gribouillé sur toutes les surfaces imaginables, exposé et vendu en galerie …

Ce qui vient à la base d’un geste contestataire, conquête illégale de l’espace public, presque un mode de vie pour certain.e.s, s’impose toujours autant au regard. D’où vient cette insolence, ou plutôt, cette audace qui pousse des peintres en bâtiment amateurs (ou peintres en métro, wagons et tunnels confondus, en train, en stores, …) à s’approprier l’espace visuel ?

Agnès Varda dit à propos des murals de L.A. « un billboard, grand panneau de réclame, c’est bien placé, c’est efficace, c’est souriant, c’est maquillé. Un mural, non. Ces murs-là n’ont rien à vendre ». 20 ans plus tard, le graffeur Slice (dans Writers) le définit comme une « nouvelle forme de publicité, une publicité sauvage. Tu fais la promotion d’un produit, et ce produit, c’est toi ». Il parle du graffiti de rue, celui pratiqué par des vandales de tout poil, celui qui fait sale. Et pourtant, les artistes qui sont aujourd’hui encensés et vendus en galerie ont commencé en dégradant des murs et des métros. Alors, il semblerait que tout ceci soit une affaire de cadre.

Ce geste trouve son approbation par la société dans des versions policées. Financé par les institutions, il devient admirable lorsqu’il se met au service des commanditaires dont il respecte règles et cahiers des charges.

Finalement, ce qui dérange, c’est le fait de sortir du cadre légal et d’affirmer une position hors-système. Pirater ainsi l’espace public, c’est aussi grignoter la place de la publicité qui nous a envahis, parfois la recouvrir, la rendre illisible. C’est aussi contester le vide d’une façade nue, y apposer un signe qui atteste de son passage dans la rue, mais aussi sur Terre.

C’est une façon de marquer son territoire. De prouver sa hardiesse, en allant toucher les surfaces les plus difficiles d’accès, ou les plus improbables. De gagner la reconnaissance de ses pairs, sans se soucier du jugement des profanes. Tout cela malgré la répression et les risques, judiciaires comme physiques.

C’est aussi le développement d’une recherche graphique, artistique. La diversité des pratiques et des supports en atteste. Le passage du mur à la toile, le développement de différents styles jusqu’à la déconstruction du lettrage pour aller vers l’abstraction, la reconnaissance par les pairs puis par le monde de l’art établi également.

Ces murs qui nous parlent, tentons de les écouter. Commençons par une escapade dans le Los Angeles de 1980 (Mur Murs), où Agnès Varda a filmé les grandes fresques figuratives, lourdes de symboles et d’histoire. Elle mêle son regard émerveillé et sa poésie à la parole des artistes.

Poursuivons avec un saut dans le temps : 2009, Sany est tchèque et graffeuse, et se rend compte qu’elle est la seule femme dans le milieu à Prague. Elle décide alors d’aller à la recherche de ses consœurs, tout autour du globe, pour porter à l’écran leur parole, et son histoire personnelle (Girl Power). En effet, ce monde animé par des valeurs attribuées à la virilité (témérité, besoin de s’imposer partout …) ne fait pas toujours la part belle aux femmes. Invisibilisées, discréditées, les pionnières ont dû s’accrocher et faire deux fois plus leurs preuves.

Enfin, tendons l’oreille vers ces murs qui nous racontent les racines du graffiti français. En 2004, les poches pleines d’archives et de contacts, Marc-Aurèle Vecchione signe un documentaire didactique sur la chronologie du mouvement à Paris (Writers, 20 ans de graffiti à Paris 1983-2003), nous livrant les clés de compréhension de ce qui apparaît parfois illisible, sur un coin de mur ou dans un tunnel de métro.

 


Le programme du cycle

 

Girl Power de Sany et Jan Zajíček | Ces murs qui nous parlent
Les séances de cinéma
Videodrome 2 | 49, cours Julien | 13006 Marseille

Dans le cadre du cycle cinéma Ces murs qui nous parlent

Girl Power de Sany et Jan Zajíček, 2016, 1h30

Writers de Marc-Aurèle Vecchione | Ces murs qui nous parlent [Séance plein-air gratuite]
Les séances de cinéma
Videodrome 2 | 49, cours Julien | 13006 Marseille

Dans le cadre du cycle cinéma Ces murs qui nous parlent

Writers, 20 ans de graffiti à Paris 1983-2003 de Marc-Aurèle Vecchione, 2004, 1h30

Mur Murs d’Agnès Varda | Ces murs qui nous parlent
Les séances de cinéma
Videodrome 2 | 49, cours Julien | 13006 Marseille

Dans le cadre du cycle cinéma Ces murs qui nous parlent
En présence de Gaël Marsaud

Les pieds sur terre (en cours) de Gaël Marsaud, 2020, 25min, film produit par Primitivi
Mur Murs d’Agnès Varda, 1981, 1h20

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Nous souhaitons que le cinéma demeure accessible à toutes et tous. Nous souhaitons pouvoir porter la singularité de notre modèle de diffusion non commercial.
La curiosité, et le plaisir des images ne doivent pas être un privilège.
Si nous conseillons un prix, 5 euros (celui que nous appliquions jusqu’à présent), ce sera prix libre à partir de janvier 2020, pour toutes les séances organisées et portées par l’équipe de Videodrome 2, signalées en conséquence dans nos supports de communication.

Adhésion annuelle obligatoire de 5 euros (de date à date)

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La billetterie ouvre 30 minutes avant le début de chaque séance


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