Le printemps du film engagé, c’est une semaine de projections et de débats, dans de multiples lieux de Marseille, « festival du cinéma engagé porté par des citoyens enragés ».
Videodrome 2 a été sollicité pour organiser une projection. Il nous a paru pertinent pour cette deuxième édition du Printemps du film engagé, de faire une proposition qui interroge de manière sensible la nature même du film engagé : qu’est-ce que « s’engager » pour un cinéaste, à l’occasion de la création d’un film ? Souvent, c’est le sujet d’un film qui détermine son caractère engagé, la nature des débats qu’il suscite, son actualité, au moment de sa diffusion.
Comment parler, cent ans après, de la révolution en Russie ? Cela nous a semblé cohérent avec la programmation du festival. Par ailleurs, le régime soviétique a simultanément mis en place un financement officiel de la création cinématographique, à laquelle le mot-valise « propagande » est souvent accolé. Mais il se trouve que les cinéastes des années 20 en Russie furent de grands inventeurs de forme.
Octobre de Sergueï Eisenstein, est porteur de multiples paradoxes : film engagé, a minima à la propagation d’une image de la révolution Russe, film de commande, commande qui plus est passée par un régime totalitaire, et splendeur formelle, lieu d’une inventivité incroyable, vertige pour l’analyse et la pensée des moyens du cinématographe…
Le film sera diffusé en copie 35mm, précédé d’un film produit par Primitivi.
Bernard PUDAL discutera à l’issue de la projection des conditions sociales de la révolution bolchévique.
20h
Octobre
Sergueï Eisenstein, URSS, 1927, 1h40, Muet.
Version sonorisée, musique de Shostakovitch.
Projection en 35mm.
Pour les 10 ans de la révolution, commande fut passée en URSS d’un film à la gloire des journées d’octobre. Il faut bien concevoir ce que peut signifier : « se mettre à la table de travail pour réaliser un film sur une Révolution ». Comment mettre en scène une chose aussi dense, multiple, complexe, qu’un processus révolutionnaire ? Comment filmer les foules, et les mouvements intimes qui les agitent, comment retracer des événements historiques, comment relater les actions des dirigeants lors des événements ?… Comment cadrer, comment monter, comment créer du sens, autre qu’illustratif, et quel sens donner ?
Chacun peut bien sûr critiquer l’analyse historique faite dans le film, relever le poids idéologique du pouvoir en place à l’époque de la fabrication du film, constater les erreurs, les omissions, les aspects propagandistes.
Mais la puissance intellectuelle et esthétique, le caractère inouï du projet, la démesure, la beauté, la singularité aussi, ne peuvent être balayées d’un revers de la main.
Octobre est, c’est difficilement contestable, un film magnifique, et un jalon de l’histoire du cinéma.
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